10 avr. 2008

SITUATION AU PÉROU

« Le malaise général augmente dans tout le pays »[1]

L

e Pérou fait partie, à échelle réduite, des pays comme l’Inde, où il fait bon boursicoter car la croissance annuelle dépasse les 7% grâce à l’envol des prix des minerais et, probablement aussi, grâce au blanchiment des fonds faramineux de la drogue. Pourtant rien, ou presque, de toute cette manne ne tombe –« gotea », comme on dit ici – dans le panier de la ménagère. Une caricature pourrait montrer l’image classique du mendiant péruvien assis sur un coffre rempli d’or…mais fermé avec un gros cadenas. Et, à côté, un Alan Garcia qui en remet la clef aux entreprises étrangères !

La chute de Garcia.

Le Président Alan Garcia a chuté dans les enquêtes de Lima, place forte du fujimorisme et de la droite (ceux-là même qui lui avaient permis de gagner de justesse les élections en 2006) : 35% l’approuvent et 55% le désapprouvent. Il en est devenu muet. On n’entend plus sa voix triomphante et vitupérante à la fois. C’est que le mécontentement augmente sans cesse et les motifs ne manquent pas :

- L’inflation ronge le gouvernement. Les prix de base grimpent, le cauchemar de son gouvernement antérieur resurgit.

- Il applique une politique qui ne crée que peu d’emplois et surtout dans le secteur des petits boulots mal payés et surexploités.

- Il criminalise les luttes syndicales au lieu de promouvoir la justice sociale.

- Son gouvernement n’applique pas les réformes fiscales qui permettraient la redistribution des richesses, laissant libres d’impôts, ou presque, les transnationales qui écument nos richesses naturelles, surtout dans le secteur minier.

- Il se noie dans la mare de la corruption interne et son «délégué anticorruption» est totalement inefficace.

- Son gouvernement est incapable, jusqu’ici, d’organiser la reconstruction des zones affectées par le tremblement de terre.

Mines et pétrole : les rois!

Garcia veut remettre 200'000 hectares de réserves naturelles aux pétroliers (dont une partie de notre parc national Tambopata-Candamo pour lequel nous nous sommes tant battus contre la Mobil), et donner toute priorité à l’exploitation minière de grande envergure. Tout cela contre les communautés indigènes et paysannes et en fustigeant les écologistes et les «curés idéalistes et ennemis du développement»! En plus, Alan Garcia ne remplit pas ses promesses d’exiger l’impôt sur les bénéfices miniers et pétroliers pour le redistribuer aux régions en faveur de la santé et l’éducation publiques.

Résultat: Il ne se passe pas une semaine sans une grève dans un secteur ou l’autre. Il y en a eu douze, nationales ou régionales, entre avril et juillet seulement. Il y a de l’orage dans le social et la foudre va continuer de tomber. Jusqu’à quand les parapluies d’Alan Garcia seront-ils imperméables ?

Xavier ARBEX, prêtre suisse Puerto Maldonado


[1] Extrait de : IMAMBARI - PEROU, Bulletin d’information des amis du Sud Pérou, n°35, nov.-déc. 2007.

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